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Le licenciement d’un salarié en arrêt maladie est un sujet qui suscite de nombreuses interrogations et inquiétudes pour l’employeur. Si le principe fondamental est la protection du salarié dont le contrat de travail est suspendu, cette protection n’est pas absolue. Il est essentiel de comprendre que la rupture du contrat reste possible, à condition de reposer sur des motifs étrangers à l’état de santé du collaborateur. Naviguer entre les obligations légales, les contraintes organisationnelles et le risque de contentieux prud’homal requiert une approche méticuleuse et bien informée. Pour une vue d’ensemble sur ces questions, le cadre général de la maladie et du contrat de travail offre des repères essentiels. Notre cabinet se consacre à l’accompagnement des entreprises pour sécuriser ces procédures complexes et prévenir les litiges.

Les motifs de licenciement valables pendant ou après un arrêt maladie non professionnelle

Pendant un arrêt de travail pour maladie non professionnelle, le contrat du salarié est suspendu. Cette période de suspension du contrat interdit à l’employeur de licencier le salarié en raison de son état de santé ou de son absence. Une telle décision serait jugée discriminatoire et donc nulle. Cependant, la jurisprudence et la loi autorisent la rupture du contrat pour des motifs distincts de la maladie.

Faute du salarié (antérieure, liée au certificat, manquement de loyauté, refus de reprise)

L’employeur conserve son pouvoir disciplinaire durant l’arrêt maladie. Il peut ainsi sanctionner une faute du salarié, à condition qu’elle ne soit pas liée à son état de santé. Plusieurs scénarios peuvent se présenter :

Une faute découverte pendant l’arrêt mais commise antérieurement peut justifier une procédure de licenciement. L’employeur doit toutefois agir rapidement, car le délai de prescription de deux mois pour engager les poursuites disciplinaires n’est pas suspendu par l’arrêt maladie.

Des fautes commises pendant l’arrêt peuvent également être sanctionnées. Par exemple, la transmission tardive et non justifiée des certificats médicaux, malgré une mise en demeure, ou la falsification d’un certificat médical, peuvent constituer une faute grave. De même, le salarié reste tenu à une obligation de loyauté. S’il exerce une activité concurrente causant un préjudice à l’entreprise durant son arrêt, il commet un manquement justifiant la rupture. En revanche, l’exercice d’une activité non concurrente et compatible avec son état de santé n’est généralement pas considéré comme fautif.

Enfin, à l’issue de l’arrêt, le refus injustifié de reprendre le travail ou de se soumettre à la visite médicale de reprise obligatoire peut être qualifié d’abandon de poste et entraîner un licenciement pour faute grave.

Trouble au fonctionnement de l’entreprise : conditions de validité

Un licenciement peut être envisagé si l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié perturbent gravement le fonctionnement de l’entreprise et rendent son remplacement définitif indispensable. Ce motif, non disciplinaire, repose sur une situation objective et des conditions strictes, appréciées au cas par cas par les juges.

L’employeur doit prouver cumulativement :

1. Une perturbation réelle et importante du fonctionnement de l’entreprise. La simple gêne ne suffit pas. L’impact s’évalue au niveau de l’entreprise entière, et non d’un seul service, sauf si ce dernier est essentiel à l’activité globale. La qualification du salarié, la taille de l’entreprise et son secteur d’activité sont des éléments pris en compte.

2. La nécessité de pourvoir au remplacement définitif du salarié absent. L’employeur doit démontrer que les solutions temporaires (CDD, intérim) ne sont plus viables et qu’une embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) est devenue impérative pour assurer la continuité de l’activité.

3. Le remplacement effectif du salarié. L’embauche du remplaçant en CDI doit intervenir à une date proche du licenciement, que ce soit juste avant ou dans un délai raisonnable après. Un remplacement par « cascade » (un salarié interne est promu sur le poste, et une embauche externe a lieu sur le poste libéré) est admis. En revanche, le simple partage des tâches entre les autres salariés ne constitue pas un remplacement.

La lettre de licenciement doit impérativement mentionner la perturbation de l’entreprise et la nécessité du remplacement. Si l’une de ces conditions fait défaut, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse, exposant l’entreprise à des sanctions financières.

La procédure de licenciement pour maladie non professionnelle

Lorsqu’un licenciement est envisagé pour un motif autre que la maladie, comme une faute ou une perturbation de l’entreprise, l’employeur doit suivre scrupuleusement la procédure de licenciement pour motif personnel. Chaque étape est déterminante pour la validité de la rupture du contrat.

Le respect des délais et des formalités (entretien préalable, notification)

La procédure débute par la convocation du salarié à un entretien préalable. Cette convocation doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge. Elle doit préciser l’objet de l’entretien, la date, l’heure et le lieu, ainsi que la possibilité pour le salarié de se faire assister.

L’entretien préalable doit avoir lieu au moins cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre de convocation. Durant cet échange, l’employeur expose les motifs du licenciement envisagé et recueille les explications du salarié. Il est important de noter que l’état de santé du salarié ne doit jamais être évoqué comme un motif de la décision.

Après l’entretien, la notification du licenciement doit être envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception, au moins deux jours ouvrables après la date de l’entretien. Cette lettre est un document capital : elle doit énoncer avec précision et de manière exhaustive le ou les motifs du licenciement. Les motifs invoqués fixent les limites du litige ; l’employeur ne pourra pas en invoquer de nouveaux devant le juge. Par exemple, pour un licenciement lié à la désorganisation, la lettre doit détailler en quoi l’absence perturbe l’entreprise et rend le remplacement définitif nécessaire.

Les conséquences financières du licenciement (indemnités)

Le licenciement d’un salarié en arrêt maladie non professionnelle ouvre droit à plusieurs indemnités, dont le calcul doit être effectué avec rigueur pour éviter tout contentieux ultérieur.

L’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est due si le salarié remplit les conditions d’ancienneté requises (huit mois ininterrompus, sauf dispositions conventionnelles plus favorables). Son montant est calculé sur la base de la rémunération brute perçue par le salarié avant son arrêt de travail, afin que son absence pour maladie n’ait pas d’impact négatif sur le calcul.

Concernant l’indemnité compensatrice de préavis, la situation est spécifique. Le salarié étant en incapacité de travailler du fait de son arrêt maladie, il ne peut pas exécuter son préavis. De ce fait, l’indemnité compensatrice de préavis n’est généralement pas due, sauf si des dispositions conventionnelles plus favorables le prévoient. Le contrat prend alors fin à la date de notification du licenciement.

Enfin, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de congés payés pour les jours de congés acquis mais non pris à la date de la rupture du contrat de travail.

Contester un licenciement pour maladie non professionnelle

Un licenciement survenu pendant un arrêt maladie peut être contesté par le salarié s’il estime que la rupture de son contrat est abusive. Pour l’employeur, il est donc primordial de comprendre les motifs qui peuvent fragiliser la procédure et les risques encourus.

Quand le licenciement est-il considéré sans cause réelle et sérieuse ?

Le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse, voire nul, dans plusieurs situations. La plus évidente est celle où le véritable motif de la rupture est l’état de santé ou l’absence du salarié. Si le salarié parvient à démontrer que le motif invoqué par l’employeur (faute, désorganisation) n’est qu’un prétexte pour masquer une raison discriminatoire, le licenciement sera annulé.

Le non-respect des conditions de fond peut également priver le licenciement de sa justification. Par exemple, dans le cas d’un licenciement pour perturbation de l’entreprise, si l’employeur ne parvient pas à prouver la désorganisation significative ou s’il n’a pas procédé au remplacement définitif du salarié dans un délai raisonnable, le juge considérera la rupture comme abusive. De même, si le licenciement est fondé sur une faute, mais que les faits reprochés ne sont pas établis ou ne présentent pas la gravité alléguée, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse.

Enfin, le non-respect d’une clause de garantie d’emploi, souvent prévue par les conventions collectives, qui interdit le licenciement pour maladie pendant une certaine durée, rendra également la rupture abusive si elle est prononcée avant la fin de cette période de protection.

Les recours et les indemnisations possibles

Un salarié qui conteste son licenciement saisit le Conseil de prud’hommes. Si le juge estime le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’employeur peut être condamné à verser au salarié diverses indemnités, qui s’ajoutent aux indemnités de fin de contrat. Il s’agit principalement de dommages-intérêts dont le montant est fixé par le juge en fonction du barème légal, qui dépend de l’ancienneté du salarié et de la taille de l’entreprise.

Dans le cas d’un licenciement jugé nul car discriminatoire (fondé sur l’état de santé), les conséquences sont bien plus lourdes. Le salarié peut demander sa réintégration dans l’entreprise. S’il ne le souhaite pas, ou si la réintégration est impossible, il a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, sans application du barème, ainsi qu’à une indemnité réparant l’intégralité de son préjudice. L’employeur devra également rembourser les allocations chômage versées au salarié à Pôle emploi.

L’importance d’un avocat en cas de licenciement pour maladie

La gestion d’un licenciement pendant un arrêt maladie est une procédure à haut risque pour l’employeur. Les conditions de validité sont strictes, et une erreur, qu’elle soit de fond ou de forme, peut entraîner des conséquences financières et juridiques significatives. La lettre de licenciement, par exemple, doit être rédigée avec une extrême précision, car elle délimite le cadre de tout litige futur.

Faire appel à un avocat en droit du travail permet de sécuriser l’ensemble du processus. Le rôle du conseil est d’analyser la situation objective de l’entreprise, de valider la légitimité du motif de licenciement envisagé et de s’assurer du respect rigoureux de chaque étape de la procédure. Cette expertise préventive est le meilleur rempart contre un contentieux prud’homal. En cas de litige, l’avocat élabore la stratégie de défense la plus adaptée pour protéger les intérêts de l’entreprise. Pour se faire accompagner par un avocat spécialisé dans les litiges de licenciement pour maladie, il est recommandé de solliciter une analyse personnalisée de votre dossier.

Chaque situation étant unique, une consultation juridique est indispensable pour évaluer les risques et définir la meilleure marche à suivre. Pour une analyse approfondie et un conseil stratégique adapté à votre entreprise, notre cabinet se tient à votre disposition.

Sources

  • Code du travail (notamment articles L. 1132-1, L. 1226-1, L. 1232-2 et suivants)
  • Jurisprudence de la Cour de cassation, chambre sociale