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La rupture du contrat de travail d’un VRP (Voyageur, Représentant, Placier) obéit à des règles spécifiques qui dérogent parfois au droit commun, notamment en ce qui concerne le préavis et les commissions post-contractuelles. Pour un employeur, maîtriser ces subtilités est essentiel afin de sécuriser la fin de la relation de travail et de prévenir d’éventuels litiges. Cet article s’inscrit dans notre guide complet sur la rupture du contrat de travail du VRP et se concentre sur deux aspects financiers déterminants : le délai-congé et les commissions de retour sur échantillonnages.

Le délai-congé du VRP : règles spécifiques et exceptions

Communément appelé préavis, le délai-congé est la période durant laquelle le contrat de travail continue de s’exécuter après la notification de sa rupture. Pour les VRP, sa durée et ses modalités présentent des particularités qu’il convient de connaître.

Durées légales et conventionnelles

L’article L. 7313-9 du Code du travail, repris par l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 3 octobre 1975, fixe des durées minimales de préavis qui s’imposent à l’employeur comme au salarié en cas de rupture unilatérale (licenciement ou démission). Ces durées varient selon l’ancienneté du VRP dans l’entreprise :

  • Moins d’un an de présence : 1 mois
  • Entre un et deux ans de présence : 2 mois
  • Au-delà de deux ans de présence : 3 mois

Le point de départ de ce délai est la date de notification de la rupture. Il s’agit d’un délai préfix, ce qui signifie qu’il ne peut être ni interrompu ni prolongé, sauf en cas d’accident du travail. Pendant cette période, le contrat se poursuit normalement : le VRP doit continuer son activité de prospection et l’employeur doit lui fournir les moyens nécessaires, sans modifier unilatéralement ses conditions de travail.

L’indemnité compensatrice en cas de dispense de préavis

Un employeur peut dispenser le VRP d’exécuter son préavis. Cette décision, qui doit être claire et non équivoque, entraîne l’obligation de verser une indemnité compensatrice de préavis. Son calcul est un point d’attention majeur. Elle doit correspondre à la rémunération nette que le VRP aurait perçue s’il avait travaillé, incluant « tous les avantages directs et indirects » qu’il aurait recueillis. En pratique, cette indemnité est souvent évaluée sur la base de la moyenne des rémunérations des derniers mois d’activité.

Il est important de noter que les remboursements de frais professionnels, n’étant pas dus pour une période non travaillée, sont déduits de cette indemnité. À l’inverse, les commissions sur des affaires conclues avant la notification de la rupture ne peuvent en être déduites. En effet, l’indemnité compensatrice de préavis a pour objet de rémunérer les nouvelles affaires que le représentant aurait pu réaliser pendant cette période.

Les cas de non-exécution du préavis sans indemnité

Dans certaines situations, le préavis n’est pas exécuté et aucune indemnité n’est due par l’employeur :

  • La faute grave : Si le licenciement est prononcé pour faute grave, la rupture du contrat est immédiate. La gravité des faits reprochés rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, même pendant la durée du préavis. Aucune indemnité compensatrice n’est alors versée.
  • L’inaptitude : Lorsqu’un VRP est déclaré inapte par le médecin du travail, il se trouve dans l’impossibilité physique d’exécuter son préavis. Si l’employeur a respecté son obligation de recherche de reclassement, il n’a pas à verser d’indemnité compensatrice. Pour plus de détails sur cette situation, vous pouvez consulter notre article sur l’indemnité de préavis en cas de licenciement pour inaptitude.
  • La demande du salarié : Le VRP peut demander à être dispensé d’effectuer son préavis, notamment s’il a trouvé un autre emploi. Si vous acceptez sa demande, le contrat prend fin à la date convenue et aucune indemnité n’est due.

Les commissions de retour sur échantillonnages : un droit spécifique au VRP

À la fin du contrat, le VRP a droit, à titre de salaire, à des commissions sur les commandes qui, bien que passées après son départ, sont la « suite directe » de son travail de prospection antérieur. C’est ce que l’on nomme le droit de retour sur échantillonnages, encadré par les articles L. 7313-11 et L. 7313-12 du Code du travail.

Nature et conditions d’octroi

Ces commissions ne sont pas des dommages-intérêts mais bien un élément de salaire. Elles visent à rémunérer le travail personnel du VRP dont les effets se manifestent après la fin du contrat. Le droit à ces commissions est ouvert quelle que soit la cause de la rupture (licenciement, démission, fin de CDD, rupture pendant l’essai) et même en cas de faute lourde.

La condition essentielle pour leur versement est l’existence d’un lien de causalité direct entre l’activité du représentant avant son départ (présentation d’échantillons, communication de prix) et les commandes passées ultérieurement. L’appréciation de ce lien relève du pouvoir des juges du fond. C’est au VRP d’apporter la preuve de ce lien, mais l’employeur, qui détient les documents comptables, a l’obligation de les fournir pour permettre le calcul des droits du représentant.

Durée du droit

Le Code du travail prévoit que la période durant laquelle ces commissions sont dues est déterminée par les usages de la profession. En l’absence d’accord spécifique, une durée de trois mois est fréquemment retenue par les tribunaux. Toutefois, le contrat de travail peut prévoir une durée plus longue, et le juge peut également l’étendre en fonction des spécificités de la clientèle ou des produits (par exemple, pour des matériels coûteux nécessitant de longues négociations). La durée totale de ce droit ne peut cependant excéder trois ans.

Articulation entre préavis, commissions et autres créances de rupture

Il est fondamental de bien distinguer la nature de chaque indemnité pour éviter les confusions. L’indemnité compensatrice de préavis et les commissions de retour sur échantillonnages ne font pas double emploi et ne se cumulent pas au sens où elles ne couvrent pas le même objet.

La Cour de cassation a clarifié ce point de longue date (Cass. soc., 30 juin 1965) : l’indemnité de préavis rémunère l’activité future que le VRP aurait dû avoir, c’est-à-dire les nouvelles affaires qu’il aurait générées pendant le préavis. Les commissions de retour sur échantillonnages, quant à elles, rémunèrent un travail déjà accompli avant la rupture, mais dont les fruits (les commandes) sont récoltés après. Il s’agit donc de deux créances salariales distinctes, qui se cumulent avec les autres indemnités de rupture comme l’indemnité de congés payés.

Ces créances sont également indépendantes des indemnités de rupture proprement dites, telles que l’indemnité de clientèle ou l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. Celles-ci réparent le préjudice lié à la perte d’emploi et à la perte de la clientèle, et obéissent à leurs propres règles de calcul et de non-cumul (seule l’indemnité la plus favorable entre l’indemnité de clientèle et l’indemnité de licenciement est versée).

La gestion de la fin de contrat d’un VRP requiert une attention particulière à ces différents postes de créances. Une erreur d’appréciation peut rapidement conduire à un contentieux prud’homal. Pour sécuriser vos procédures de rupture ou pour toute question relative à l’indemnisation de vos VRP, il est recommandé de solliciter un conseil avisé en droit du travail.

Sources

  • Code du travail : articles L. 7313-9 à L. 7313-12
  • Accord National Interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975