Le statut de VRP (Voyageur, Représentant, Placier) obéit à des règles spécifiques qui dérogent parfois au droit commun du travail. La période d’essai, phase déterminante pour l’employeur comme pour le salarié, ne fait pas exception. Pour une entreprise, sécuriser cette étape initiale est essentiel afin d’évaluer les compétences de son représentant commercial tout en maîtrisant le cadre juridique de la relation naissante. Cet article s’inscrit dans notre guide juridique complet du statut de VRP et se concentre sur les particularités de la période d’essai : sa durée, sa suspension et les conditions de sa rupture.
La durée légale de la période d’essai pour les VRP
Le contrat de travail d’un VRP peut tout à fait prévoir une période d’essai. Cependant, sa durée est strictement encadrée par des dispositions d’ordre public, ce qui signifie que ni l’employeur ni le salarié ne peuvent y déroger, même par un accord mutuel qui prévoirait une durée plus longue.
Le plafond de trois mois et son caractère impératif
L’article L. 7313-5 du Code du travail est formel : la période d’essai d’un VRP ne peut excéder trois mois. Cette durée maximale est impérative. Toute clause contractuelle qui fixerait une période d’essai initiale de quatre mois, par exemple, serait illégale. La jurisprudence est constante sur ce point et rappelle régulièrement que ce plafond de trois mois ne peut être dépassé. De même, le contrat d’un VRP ne peut pas prévoir de renouvellement de la période d’essai. La durée de trois mois est donc un maximum absolu et non renouvelable.
L’articulation avec les règles du droit commun de la période d’essai
Pour tout ce qui n’est pas spécifiquement réglé par le statut des VRP, les dispositions du droit commun du travail s’appliquent. Ainsi, les règles générales encadrant la période d’essai, prévues aux articles L. 1221-19 à L. 1221-26 du Code du travail, trouvent à s’appliquer. C’est notamment le cas pour les VRP recrutés en contrat à durée déterminée (CDD). Pour ces derniers, la durée de l’essai est calculée en fonction de la durée du contrat, conformément à l’article L. 1242-10 du Code du travail, sans jamais pouvoir excéder le plafond de trois mois propre aux VRP si celui-ci est plus court que la durée calculée selon le droit commun.
Suspension et prolongation de la période d’essai du VRP
La période d’essai a pour but de permettre à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié en situation de travail. Si le salarié est absent, cette évaluation est impossible. Le contrat est alors suspendu, ce qui a des conséquences sur le décompte de la période d’essai.
Les événements suspensifs (maladie, congés payés, etc.)
Lorsqu’un événement indépendant de la volonté des parties empêche l’exécution du travail, la période d’essai est suspendue. C’est le cas notamment d’un arrêt de travail pour maladie, d’un accident du travail, ou de la prise de congés payés. La durée de la suspension prolonge d’autant la période d’essai. Par exemple, si un VRP est en arrêt maladie pendant dix jours au cours de son essai de trois mois, le terme de sa période d’essai sera repoussé de dix jours. Cette prolongation correspond exactement à la durée de l’absence. Il est essentiel de comprendre que les règles de suspension du contrat de travail pour maladie s’appliquent ici pleinement, protégeant l’objectif même de la période d’essai.
Les interdictions de prolongation au-delà du délai légal maximum
La suspension prolonge la période d’essai, mais elle ne permet en aucun cas de dépasser la durée effective de travail de trois mois. La jurisprudence veille scrupuleusement à ce que la prolongation de l’essai due à une suspension ne soit pas supérieure à la durée de l’absence du salarié. Si un VRP est absent un mois, son essai est prolongé d’un mois, mais le temps de travail effectif cumulé ne pourra jamais aller au-delà de trois mois. Une rupture intervenant après ce délai, même si elle est justifiée par une prétendue prolongation, serait requalifiée en licenciement classique.
Le régime juridique de la preuve et du formalisme de la période d’essai
Pour un employeur, la validité de la période d’essai repose entièrement sur le respect d’un formalisme précis. L’absence d’écrit emporte des conséquences radicales qui peuvent fragiliser considérablement l’entreprise en cas de rupture précoce du contrat.
L’exigence d’un écrit et ses conséquences sur la validité de l’essai
En droit du travail, la période d’essai ne se présume jamais. L’article L. 1221-23 du Code du travail impose qu’elle soit « expressément stipulée dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail ». Cette règle est fondamentale. Si aucune clause ne mentionne l’existence d’une période d’essai, celle-ci est tout simplement inexistante. Le contrat est alors considéré comme définitif dès le premier jour. Pour l’employeur, les conséquences sont majeures : toute rupture du contrat ne pourra plus suivre le régime souple de la période d’essai, mais devra respecter la procédure de licenciement, avec la nécessité de prouver une cause réelle et sérieuse. L’absence d’un écrit clair et non équivoque prive l’employeur du droit de se prévaloir d’une période d’essai et de la liberté de rupture qui y est attachée.
La rupture du contrat pendant la période d’essai du VRP
La rupture durant l’essai est en principe libre, mais cette liberté est encadrée. L’employeur doit respecter un délai de prévenance et veiller à ne pas commettre d’abus, sous peine de voir la rupture contestée et de devoir verser des dommages-intérêts.
Le principe de liberté de rupture et l’absence d’indemnités spécifiques
Pendant la période d’essai, chacune des parties peut rompre le contrat de travail de manière discrétionnaire, sans avoir à motiver sa décision. Sauf faute grave de l’autre partie, cette rupture n’ouvre droit à aucune indemnité spécifique. Cela signifie que le VRP dont le contrat est rompu durant l’essai ne peut prétendre ni à l’indemnité de licenciement, ni à la fameuse indemnité de clientèle, qui constitue l’une des particularités majeures du statut. Cette absence d’indemnité de clientèle est une exception importante qui souligne l’intérêt pour l’employeur de bien définir cette période initiale.
Le respect du délai de prévenance et la rupture abusive
La liberté de rupture n’est pas absolue. Elle est tempérée par l’obligation de respecter un délai de prévenance, dont la durée varie en fonction du temps de présence du salarié dans l’entreprise. Si la rupture émane de l’employeur, ce délai est fixé par l’article L. 1221-25 du Code du travail :
- 24 heures si le VRP est présent depuis moins de 8 jours ;
- 48 heures entre 8 jours et 1 mois de présence ;
- 2 semaines après 1 mois de présence.
Ce délai de prévenance ne peut avoir pour effet de prolonger la relation de travail au-delà du terme maximal de trois mois de l’essai. Par ailleurs, la rupture peut être jugée abusive si elle est fondée sur un motif non inhérent à la personne du salarié (par exemple, un motif économique) ou si elle procède d’une légèreté blâmable de l’employeur. Une rupture intervenant quelques jours seulement après l’embauche sans que le VRP ait eu le temps de faire ses preuves pourrait, par exemple, être considérée comme abusive et donner lieu au versement de dommages-intérêts.
La gestion de la période d’essai d’un VRP requiert une attention particulière aux règles spécifiques qui la régissent. De sa durée impérative à l’exigence d’un écrit, chaque détail compte pour sécuriser la relation de travail dès ses débuts. Pour un accompagnement par un avocat expert en droit du travail dans la rédaction de vos contrats de VRP et la gestion de leurs spécificités, notre cabinet se tient à votre disposition.
Sources
- Code du travail : articles L. 7313-5 (durée de l’essai du VRP)
- Code du travail : articles L. 1221-19 à L. 1221-26 (régime de droit commun de la période d’essai)
- Code du travail : articles L. 1242-10 (essai pour les contrats à durée déterminée)