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Les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise, ou BSPCE, sont devenus un instrument incontournable pour les startups et les PME en croissance cherchant à attirer et fidéliser leurs talents. Plus qu’un simple outil de rémunération complémentaire, ils représentent un levier stratégique pour aligner les intérêts des salariés et dirigeants avec ceux de l’entreprise. Cependant, leur mise en place est une opération juridiquement complexe, qui requiert l’assistance d’un avocat expert pour sécuriser la procédure et optimiser le montage fiscal. Ce guide a pour vocation d’offrir une vision claire et pratique du fonctionnement des BSPCE, à jour des dernières évolutions pour 2025.

Définition et intérêt stratégique des bspce

Qu’est-ce qu’un bspce et à quoi sert-il ?

Un bon de souscription de parts de créateur d’entreprise est un instrument financier qui donne à son titulaire le droit, mais non l’obligation, de souscrire (c’est-à-dire d’acheter) des actions de l’entreprise à un prix fixé de manière définitive le jour de leur attribution. L’intérêt principal pour le salarié ou le dirigeant réside dans la plus-value potentielle : si la valeur de l’entreprise augmente, le titulaire pourra acquérir des actions à un prix inférieur à leur valeur réelle de marché au moment de l’exercice de ses bons, réalisant ainsi un gain significatif lors de la cession de ses titres.

Pourquoi les bspce sont un levier clé pour startups et pme ?

Pour les jeunes entreprises dont la trésorerie est souvent limitée, notamment entre deux levées de fonds, les BSPCE constituent une alternative puissante aux augmentations de salaires directes. Ils permettent d’offrir une perspective de gain futur substantiel, conditionné à la réussite collective de l’entreprise. Outil puissant d’attraction et de fidélisation, les BSPCE s’inscrivent dans une famille plus large de dispositifs d’actionnariat salarié, tout comme l’intéressement ou la participation, chacun possédant un cadre juridique et fiscal spécifique. Ils sont particulièrement efficaces pour motiver les managers et les collaborateurs clés en les transformant en partenaires potentiels, directement intéressés par la valorisation de la société à long terme.

Conditions d’éligibilité : société et bénéficiaires

Les critères d’éligibilité pour émettre des bspce

Le droit d’émettre des BSPCE est réservé à une catégorie précise d’entreprises. Pour être éligible, une société par actions (SA, SAS, SCA) doit remplir plusieurs conditions cumulatives, appréciées à la date d’attribution des bons :

  • Être passible de l’impôt sur les sociétés en France.
  • Ne pas être cotée sur un marché réglementé ou, si elle l’est, avoir une capitalisation boursière inférieure à 150 millions d’euros.
  • Être immatriculée au Registre du commerce et des sociétés depuis moins de 15 ans.
  • Être détenue directement et de manière continue à hauteur de 25 % au moins de son capital social par des personnes physiques (ou par des sociétés elles-mêmes détenues à 75 % par des personnes physiques).
  • Ne pas avoir été créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension ou d’une reprise d’activités préexistantes, sauf exceptions précisément encadrées.

Ces critères visent à cibler les jeunes entreprises innovantes et en forte croissance, pour qui cet outil constitue une véritable aide au développement. Un non-respect de l’une de ces conditions peut invalider le régime fiscal avantageux des bons émis.

Qui peut bénéficier des bspce ? (salariés et dirigeants)

Les BSPCE peuvent être attribués aux membres du personnel salarié de la société émettrice. La loi PACTE du 22 mai 2019 a élargi le cercle des bénéficiaires aux dirigeants mandataires sociaux. Sont ainsi concernés le président du conseil d’administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, les membres du directoire et, dans les SAS, les membres de tout organe statutaire équivalent. L’attribution peut être réservée à certaines catégories de personnel ou même être individualisée, sous réserve de ne pas reposer sur des critères discriminatoires.

Spécificités pour les groupes de sociétés et filiales

Depuis la loi du 7 août 2015, une société mère peut attribuer des BSPCE aux salariés et dirigeants de ses filiales, quel que soit le pays où se trouve leur siège. Cette possibilité est toutefois encadrée de manière stricte. La société mère doit détenir au moins 75 % du capital ou des droits de vote de la filiale concernée. De plus, la filiale elle-même doit respecter l’ensemble des conditions d’éligibilité propres aux sociétés émettrices, à l’exception de celle relative à la détention du capital. La mise en place d’un plan de BSPCE au sein d’un groupe de sociétés demande une vigilance particulière pour s’assurer que l’ensemble du montage juridique respecte les conditions légales à chaque étape.

Procédure d’attribution et d’exercice des bspce

Rôle de l’assemblée générale extraordinaire et du conseil d’administration

La décision de mise en place d’un plan de BSPCE suit une procédure en deux temps, rigoureusement définie par le Code de commerce. D’abord, l’Assemblée Générale Extraordinaire (AGE) des actionnaires doit autoriser le principe de l’émission des bons. Elle se prononce sur le rapport du conseil d’administration (ou de l’organe de direction équivalent) et sur celui du commissaire aux comptes, s’il existe, concernant l’émission des BSPCE. L’AGE fixe le cadre général, notamment la période de validité de l’autorisation, le prix d’acquisition des titres et le délai d’exercice des bons. Ensuite, sur la base de cette autorisation, le conseil d’administration procède à l’attribution effective des BSPCE, en établissant la liste précise des titulaires et les conditions spécifiques de leur exercice, formalisées dans le règlement du plan.

Fixation du prix d’acquisition et risques de contentieux sur la valorisation

Le prix d’acquisition des actions est un élément central et l’une des principales sources de risque juridique. Il est fixé de manière intangible le jour de l’attribution. L’article 163 bis G du Code général des impôts (CGI) encadre cette fixation : si la société a réalisé une augmentation de capital par émission de titres similaires dans les six mois précédant l’attribution, le prix d’exercice des BSPCE doit être au moins égal au prix d’émission de ces titres. La loi PACTE a introduit une souplesse en autorisant une décote si une perte de valeur économique est démontrée. L’évaluation de cette « juste valeur », surtout dans les sociétés non cotées, est un exercice délicat qui requiert une analyse comptable et financière approfondie. Une valorisation jugée manifestement sous-évaluée ou de complaisance par l’administration fiscale expose l’entreprise et le titulaire à une requalification du gain en salaire, avec de lourdes conséquences en matière de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu.

Conditions d’exercice et rédaction des clauses (vesting, cliff, accélération)

L’exercice des BSPCE est souvent soumis à des conditions définies dans le plan d’attribution, qui constituent le cœur du mécanisme de fidélisation. Les plus courantes sont les clauses de « vesting », qui organisent l’acquisition progressive des droits sur plusieurs années (la période de vesting), conditionnée à la présence continue du collaborateur dans l’entreprise. Un « cliff » est souvent stipulé : il s’agit d’une période initiale (généralement un an) durant laquelle aucun droit n’est acquis, afin de s’assurer de l’engagement du collaborateur. La rédaction de ces clauses doit être d’une grande précision pour prévenir les litiges, notamment en cas de départ du salarié (démission, licenciement). Des clauses d’accélération peuvent aussi être prévues, permettant une acquisition anticipée de tous les bons en cas d’événement majeur comme une fusion ou une cession de l’entreprise. Cette aide protège les droits des titulaires.

Régime fiscal et social des bspce

Fiscalité des BSPCE : imposition du gain de cession (PFU et réformes 2025)

Le principal avantage des BSPCE réside dans leur régime fiscal et social attractif. L’avantage tiré de l’exercice des bons n’est pas imposé au moment de la souscription des actions, mais lors de leur cession ultérieure. C’est le gain net de cession (différence entre le prix de vente des actions et leur prix de souscription après paiement) qui est fiscalisé. Le taux d’imposition varie selon l’ancienneté du titulaire dans l’entreprise à la date de la cession :

  • Si le collaborateur exerce son activité dans la société depuis moins de 3 ans, le gain net est imposé au taux majoré de 30 %, auquel s’ajoutent 17,2 % de prélèvements sociaux.
  • Si le collaborateur exerce son activité depuis au moins 3 ans, le gain est soumis au régime fiscal plus favorable de 12,8 % (Prélèvement Forfaitaire Unique, aussi appelé PFU ou flat tax, sauf option pour le barème progressif), plus 17,2 % de prélèvements sociaux. Ce régime, en vigueur depuis le 1er janvier 2018, a simplifié l’imposition.

Les entreprises doivent rester attentives aux évolutions législatives, notamment celles qui pourraient intervenir post-2025. De plus, l’utilisation des BSPCE dans des montages complexes de type « Management Packages » doit faire l’objet d’une analyse approfondie pour éviter tout risque de requalification des gains en traitement et salaire par l’administration fiscale.

Impact des prélèvements sociaux (csg-crds) sur les bspce

Contrairement aux salaires, les gains issus de la cession d’actions souscrites via des BSPCE ne sont pas soumis aux cotisations sociales patronales et salariales. Ils sont cependant assujettis aux prélèvements sociaux (CSG, CRDS, etc.) au taux global de 17,2 %, appliqués au titre des revenus du patrimoine. Cette exonération de cotisations sociales constitue un avantage majeur tant pour l’entreprise, qui économise les charges patronales, que pour le titulaire, dont le gain net est plus élevé.

Obligations déclaratives pour l’entreprise et les bénéficiaires

La société émettrice est tenue à des obligations déclaratives strictes, dont le non-respect peut remettre en cause le régime de faveur. Elle doit d’abord fournir à chaque titulaire, au plus tard le 1er mars de l’année suivant celle de l’exercice des bons, un état individuel qui détaille l’opération (date, nombre, prix d’acquisition). Ensuite, elle doit reporter ces informations dans la Déclaration Sociale Nominative (DSN) lors du dépôt mensuel transmis à l’administration fiscale. Tout manquement expose l’entreprise à des amendes et compromet la sécurité juridique du dispositif pour les titulaires de bons.

Avantages stratégiques et limites des bspce

Pour l’entreprise : attractivité, fidélisation des talents et alignement d’intérêts

Pour une PME ou une startup, l’avantage principal est de pouvoir proposer un package de rémunération attractif sans impacter sa trésorerie immédiate et avec un coût fiscal et social maîtrisé. C’est un outil puissant pour fidéliser les collaborateurs sur le long terme, leur présence étant souvent une condition pour exercer leurs bons (vesting). Enfin, en donnant la perspective de devenir actionnaire, les BSPCE créent un alignement naturel entre les intérêts des salariés et ceux des fondateurs : la croissance de la valeur de l’entreprise devient un objectif patrimonial partagé.

Pour les bénéficiaires : potentiel de plus-value et risques associés

Le titulaire espère réaliser une plus-value significative si l’entreprise se valorise, ce qui constitue le principal moteur du dispositif. Néanmoins, cet avantage n’est jamais garanti. Le gain est purement potentiel et dépend entièrement de la performance de la société et de sa capacité à offrir une liquidité. En cas de difficultés, les actions peuvent ne jamais valoir plus que le prix d’exercice, rendant les bons sans valeur. De plus, l’exercice des bons entraîne une réduction mécanique du pourcentage de détention (dilution) du capital pour les actionnaires existants, un facteur à anticiper.

Bspce et opérations complexes : fusions, groupes, mandataires sociaux

Implications des restructurations (fusions, cessions) et de la notion de groupe

Les opérations de restructuration telles que les fusions, acquisitions ou cessions de contrôle ont un impact direct sur les plans de BSPCE. Le sort des bons doit être méticuleusement anticipé, à la fois dans les plans d’attribution (via des clauses d’accélération, par exemple) et dans la documentation juridique de l’opération (traité de fusion, pacte d’actionnaires). Sans cette précaution, les titulaires pourraient voir leurs droits caducs ou fortement diminués. La notion de groupe de sociétés est également centrale, car elle conditionne l’éligibilité des salariés de filiales et peut complexifier les schémas d’attribution, notamment lorsque le siège de certaines filiales est localisé dans un autre État membre de l’Union Européenne.

Situation particulière des dirigeants mandataires sociaux non-salariés

L’attribution de BSPCE à des mandataires sociaux non titulaires d’un contrat de travail est une faculté précieuse qui peut aider à les fidéliser, mais elle est juridiquement sensible. La jurisprudence est stricte et veille à ce que ces avantages ne constituent pas une rémunération déguisée du mandat social. Si les BSPCE sont perçus comme la contrepartie de l’activité normale de direction, il existe un risque majeur de requalification des gains en rémunération de mandat, avec des conséquences fiscales et sociales potentiellement lourdes. Il est donc impératif de documenter précisément que les BSPCE sont attribués en contrepartie d’une contribution exceptionnelle ou d’objectifs spécifiques, distincts des fonctions de direction classiques.

Consultation des irp et prévention des contentieux liés aux clauses

Bien qu’il n’existe pas d’obligation légale expresse de consulter le Comité Social et Économique (CSE) pour la mise en place d’un plan de BSPCE, cette consultation peut s’imposer si l’opération a des conséquences sur la marche générale de l’entreprise, notamment en cas d’augmentation de capital significative ou de modification de la structure des effectifs. C’est un point de vigilance important pour maintenir un dialogue social de qualité. Par ailleurs, la prévention des contentieux passe par une rédaction irréprochable des clauses du projet de plan (vesting, conditions de performance, etc.). Des clauses ambiguës, trop restrictives ou jugées abusives peuvent être source de litiges longs et coûteux pour l’entreprise.

Comparaison des bspce avec d’autres dispositifs d’actionnariat salarié

Distinctions clés avec les stock-options

Les stock-options sont un dispositif plus ancien et plus large, accessible à toutes les sociétés par actions, alors que les BSPCE sont réservés aux jeunes entreprises répondant à des critères stricts. Bien que visant des objectifs similaires, les BSPCE se distinguent nettement du régime juridique des stock-options, notamment sur les conditions d’éligibilité des sociétés émettrices et surtout sur la fiscalité du gain, qui est généralement plus favorable pour les BSPCE.

Quid des bons de souscription d’actions (BSA) ?

Il convient de ne pas confondre les BSPCE avec les BSA. Si les deux sont des valeurs mobilières donnant le droit de souscrire à des actions à un prix fixé, le BSA est un instrument beaucoup plus souple, non réservé aux salariés et dirigeants, et ne bénéficie pas de la fiscalité avantageuse spécifique des BSPCE. Son gain est traité comme une plus-value de cession de valeurs mobilières classique. Le BSA est souvent utilisé pour les investisseurs ou des consultants externes.

Différences fondamentales avec les actions gratuites (aga)

La différence majeure réside dans leur nature : les actions gratuites (AGA) sont, comme leur nom l’indique, attribuées sans contrepartie financière. Le titulaire devient pleinement propriétaire des actions au terme d’une période d’acquisition, sans avoir à les acheter. Les BSPCE, au contraire, impliquent un prix d’exercice à payer. Le risque financier pour le titulaire est donc plus élevé avec les BSPCE, mais le potentiel de gain peut être démultiplié grâce à l’effet de levier si la valeur de l’action croît fortement.

Complémentarité ou alternative aux plans d’épargne salariale (pee)

Enfin, les BSPCE ne doivent pas être confondus avec les mécanismes collectifs comme les plans d’épargne salariale (PEE), qui permettent des augmentations de capital réservées aux salariés dans un cadre différent. Le PEE est un dispositif d’épargne collectif, souvent ouvert à l’ensemble des salariés, tandis que les BSPCE sont un outil d’attribution individuelle et ciblée, visant à récompenser et fidéliser des profils spécifiques. Les deux outils peuvent coexister et être complémentaires dans une politique globale de partage de la valeur.

La mise en œuvre d’un plan de BSPCE est un acte de gestion stratégique qui engage l’entreprise sur le long terme. Pour sécuriser la procédure, optimiser la fiscalité et prévenir les risques de contentieux, l’accompagnement par notre cabinet vous assure une expertise adaptée à vos enjeux. Notre aide vous permettra de définir le meilleur montage pour votre projet et vos clients internes (les salariés). N’hésitez pas à nous contacter pour une analyse personnalisée.

Sources

  • Code de commerce
  • Code général des impôts (CGI)
  • Code du travail