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Le Plan d’Épargne Interentreprises (PEI) représente un levier stratégique et efficace pour les petites et moyennes entreprises souhaitant associer leurs salariés à leur performance. Souvent perçu comme complexe, il s’agit en réalité d’un dispositif d’épargne salariale mutualisé, particulièrement adapté aux structures qui ne disposent pas des ressources pour gérer leur propre plan d’épargne et qui ont besoin d’un outil simple. Au-delà d’un simple outil de motivation, le PEI devient une réponse directe aux nouvelles obligations légales en matière de partage de la valeur. Pour naviguer ces options et sécuriser la mise en place du dispositif le plus adapté à votre entreprise, l’assistance d’un avocat expert en épargne salariale est une étape décisive.

I. Définition et rôle du pei : un dispositif collectif d’épargne salariale

Le Plan d’Épargne Interentreprises (PEI) est un des principaux dispositifs d’épargne salariale, permettant aux salariés de plusieurs entreprises de se constituer une épargne à moyen terme avec l’aide de leur employeur. Conçu comme un système d’épargne collectif, il offre aux TPE et PME un accès simplifié à l’épargne salariale en mutualisant les frais de gestion entre plusieurs sociétés adhérentes. Ces dernières peuvent n’avoir aucun autre lien que leur appartenance à une même branche professionnelle ou à une même zone géographique, comme le précise l’article L. 3333-1 du Code du travail.

A. Qu’est-ce qu’un pei et à qui s’adresse-t-il ?

Fondamentalement, le PEI fonctionne sur les mêmes bases qu’un Plan d’Épargne d’Entreprise (PEE), mais il est établi à un niveau supérieur à l’entreprise. Son principal atout pour un dirigeant de PME réside dans sa simplicité de mise en œuvre et ses coûts partagés. Une fois le PEI mis en place, par exemple au niveau d’une branche, une entreprise peut y adhérer sans avoir à négocier son propre accord complexe.

Le caractère collectif du dispositif impose qu’il soit ouvert à tous les salariés, sous réserve d’une condition d’ancienneté qui ne peut excéder un délai de trois mois. Dans les entreprises de moins de 250 salariés, le règlement du plan peut prévoir d’étendre son bénéfice aux chefs d’entreprise et mandataires sociaux, ainsi qu’à leur conjoint ou partenaire de PACS ayant le statut de conjoint collaborateur ou associé. Cette extension, prévue à l’article L. 3332-2 du Code du travail, constitue un avantage non négligeable pour les dirigeants de petites structures.

B. Le pei comme réponse aux obligations de la loi partage de la valeur 2025

La loi du 29 novembre 2023 sur le partage de la valeur instaure une obligation nouvelle pour les entreprises de 11 à 49 salariés. À compter du 1er janvier 2025, celles qui sont profitables – c’est-à-dire ayant réalisé un bénéfice net fiscal d’au moins 1 % de leur chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs – devront mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur. Le PEI se positionne comme l’une des solutions clés pour répondre à cette exigence.

Face à cette obligation, les employeurs concernés auront le choix entre plusieurs options : la participation, l’intéressement, la Prime de Partage de la Valeur (PPV) ou la mise en place d’un plan d’épargne salariale. Adhérer à un PEI de branche constitue une voie pragmatique et sécurisée pour se mettre en conformité, en bénéficiant d’une structure déjà existante et d’un cadre juridique éprouvé. Cette démarche permet de remplir l’obligation légale tout en offrant un véritable outil de motivation et de fidélisation du personnel.

II. Mise en place et fonctionnement du Plan d’Épargne Interentreprises

La mise en place d’un PEI est encadrée par des règles précises qui varient selon le contexte. Pour la direction de l’entreprise, comprendre ces modalités est la première étape pour une adhésion réussie et juridiquement solide. L’enjeu est de choisir la voie la plus adaptée à sa situation tout en respectant les obligations de dialogue social.

A. Les modalités de mise en place : accord de branche, accord interentreprises ou décision unilatérale

Plusieurs voies permettent d’instituer ou de rejoindre un PEI :

  • L’accord de branche : C’est la solution la plus courante. L’organisation des partenaires sociaux d’une branche professionnelle négocie un PEI « clé en main ». Les entreprises relevant du champ d’application de cet accord peuvent alors y adhérer simplement, souvent par une décision unilatérale si elles comptent moins de 50 salariés.
  • L’accord entre plusieurs employeurs : Des entreprises prises individuellement, qui ne sont pas nécessairement liées financièrement mais qui partagent une proximité géographique ou sectorielle, peuvent décider de conclure ensemble un accord instituant un PEI. L’accord doit alors être approuvé dans les mêmes termes dans chaque entreprise adhérente, selon l’une des modalités prévues pour un accord de participation (négociation collective avec le CSE, ratification par le personnel, etc.).
  • La décision unilatérale de l’employeur (DUE) : Une entreprise peut décider seule d’adhérer à un PEI existant. Cette faculté est cependant encadrée. Si l’entreprise est dépourvue de délégué syndical et de CSE, la décision est libre. En revanche, en présence d’une représentation du personnel, la DUE n’est possible qu’après l’échec des négociations, constaté par un procès-verbal de désaccord.

B. Adhésion, révision et dénonciation d’un accord pei

La vie d’un PEI est dynamique. Une entreprise qui n’était pas partie à l’accord initial peut y adhérer ultérieurement. Si l’accord de branche ou interentreprises le prévoit, l’adhésion peut être simplifiée. À défaut, elle nécessite un avenant à l’accord initial.

De même, une entreprise peut souhaiter se retirer d’un PEI. La sortie s’opère par la dénonciation de l’accord, dans le respect des formes et des préavis prévus par le règlement du plan ou par les règles du droit commun du travail. Cette flexibilité est essentielle pour l’employeur, qui doit pouvoir adapter ses dispositifs sociaux à l’évolution de sa stratégie et de sa situation économique. La révision de l’accord obéit également à des règles strictes, nécessitant en principe l’accord de l’ensemble des parties signataires, bien que des procédures simplifiées existent pour certaines modifications techniques ou rendues nécessaires par la loi, comme le stipule l’article L. 3333-7 du Code du travail.

C. Les obligations de consultation du cse pour la mise en place et le suivi

La mise en place ou l’adhésion à un PEI est une décision qui affecte la politique sociale de l’entreprise et doit, à ce titre, impliquer les représentants du personnel. La consultation au sein du Comité Social et Économique (CSE) est une étape incontournable qui garantit la validité de la démarche.

Lorsque la mise en place se fait par accord collectif majoritaire, la consultation préalable du CSE n’est pas requise. En revanche, si l’employeur envisage une adhésion par décision unilatérale suite à l’échec de négociations, il doit impérativement consulter le CSE sur le projet de règlement ou d’adhésion au moins 15 jours avant son dépôt auprès de l’administration, conformément à l’article L. 3332-5 du Code du travail. L’avis du CSE, ainsi que le procès-verbal de désaccord des négociations, devront être joints au dossier de dépôt. Le non-respect de cette obligation de consultation constitue un délit d’entrave et peut entraîner la remise en cause des exonérations sociales et fiscales attachées au PEI. Pour l’employeur, sécuriser cette étape est donc fondamental.

III. Alimentation, investissement et fiscalité du pei

Le principal attrait du PEI réside dans son régime social et fiscal avantageux, tant для l’entreprise que pour les salariés. Pour en tirer le meilleur parti, il est essentiel pour l’employeur de maîtriser les différentes sources d’alimentation du plan et les règles qui les régissent, notamment en matière d’abondement.

A. Sources d’alimentation du pei : versements salariés et abondement employeur

Le PEI peut être alimenté par plusieurs sources :

  • Les versements volontaires des salariés : Chaque bénéficiaire peut effectuer des versements, dans la limite de 25 % de sa rémunération annuelle brute.
  • L’intéressement : Les primes d’intéressement peuvent être directement affectées au PEI. C’est une manière d’encourager l’épargne et de bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu sur ces sommes.
  • La participation : De même, les sommes issues de la réserve spéciale de participation aux résultats peuvent alimenter le plan. Pour les entreprises de moins de 50 salariés, le PEI peut même servir de réceptacle à une participation volontaire.
  • L’abondement de l’employeur : C’est la contribution financière complémentaire de l’entreprise, qui vient compléter les versements des salariés. L’abondement est un outil de motivation puissant. Il est plafonné au triple du versement du salarié et à 8 % du Plafond Annuel de la Sécurité Sociale (PASS). Ces dispositifs peuvent également être articulés avec des opérations plus complexes telles que des augmentations de capital réservées, bien que cela soit plus fréquent dans le cadre d’un PEE.

L’employeur doit veiller au respect du principe de non-substitution : l’abondement ne peut en aucun cas se substituer à un élément de salaire existant, comme le rappelle l’article L. 3332-13 du Code du travail.

B. Régime social et fiscal : optimiser les exonérations pour l’employeur et le salarié

Le cadre fiscal et social du PEI est conçu pour être particulièrement avantageux.

Pour l’employeur :

  • Les sommes versées au titre de l’abondement sont déductibles du bénéfice imposable.
  • Elles sont exonérées de cotisations de sécurité sociale.
  • Elles restent soumises à la CSG-CRDS et, le cas échéant, au forfait social.

Le forfait social est un point clé pour les PME. Son taux normal est de 20 %. Cependant, une exonération totale s’applique sur les sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement pour les entreprises de moins de 50 salariés. Cette disposition, issue de la loi Pacte, renforce considérablement l’attractivité du PEI pour les petites structures, grâce à une prise en charge allégée de leur charge sociale.

Pour le salarié :

  • L’abondement de l’employeur n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu.
  • Les gains et plus-values réalisés à la sortie du plan (après 5 ans) sont également exonérés d’impôt sur le revenu, mais restent soumis aux prélèvements sociaux.

C. Placements et déblocage anticipé des avoirs : règles et exceptions

La somme investie sur un PEI est placée dans des produits d’épargne collectifs, principalement une gamme de Fonds Communs de Placement d’Entreprise (FCPE) diversifiés ou des SICAV. Une différence majeure avec le PEE est que le PEI exclut par nature les supports d’actionnariat salarié. Il n’est donc pas possible d’y acquérir directement des titres de son entreprise. L’objectif est de proposer des placements diversifiés et mutualisés, adaptés à un horizon de moyen terme et à un profil de risque variable. Lorsque les fonds sont investis en titres de la société, le plan d’épargne devient un outil puissant au sein des stratégies d’actionnariat salarié, alignant les intérêts des employés avec la performance de l’entreprise.

Les avoirs sont en principe bloqués pendant une durée de blocage minimale de cinq ans. Cependant, la loi prévoit plusieurs cas de déblocage anticipé permettant au salarié de récupérer son épargne avant l’échéance, sans perdre les avantages fiscaux, sur simple demande. Ces cas, listés à l’article R. 3324-22 du Code du travail, incluent des événements majeurs de la vie : mariage ou PACS, naissance ou adoption du troisième enfant, achat ou remise en état de la résidence principale, rupture du contrat de travail, invalidité, décès ou surendettement.

IV. Pei et autres dispositifs d’épargne salariale : synergies et différences

Le PEI s’intègre dans un écosystème plus large d’outils d’épargne salariale. Pour un dirigeant d’entreprise, il est important de comprendre ses spécificités par rapport aux autres plans afin de construire une politique de rémunération et de motivation cohérente et optimisée.

A. Pei vs pee et perco/pereco : choisir le plan adapté

Chaque dispositif répond à des objectifs distincts. Le conseil sur le choix de l’un ou de l’autre dépend de la taille de l’entreprise, de sa stratégie et de ses capacités de gestion.

  • PEI vs PEE : Bien que partageant des objectifs similaires, le PEI se distingue de son homologue, le Plan d’Épargne d’Entreprise (PEE), principalement par son caractère collectif qui mutualise les coûts de gestion entre plusieurs PME. Le PEE est un plan propre à une seule entreprise ou un seul groupe, ce qui lui offre plus de souplesse pour intégrer de l’actionnariat salarié, mais exige une gestion plus lourde. Le PEI est souvent la porte d’entrée la plus simple et économique pour une TPE/PME qui veut mettre en place un PEE.
  • PEI vs PERCO/PERECO : La distinction est ici fondamentale. Le PEI est un dispositif d’épargne à moyen terme (blocage de 5 ans). Il est donc crucial de ne pas le confondre avec les plans d’épargne pour la retraite comme le PERCO/PERECO, dont l’horizon de placement est spécifiquement tourné vers la fin de carrière et souvent lié à des produits d’assurance. Les sommes y sont bloquées jusqu’au départ à la retraite. Le choix entre ces plans dépend de l’objectif poursuivi : constituer une épargne de précaution ou préparer sa retraite.

Une entreprise peut cumuler plusieurs dispositifs, par exemple un PEI pour l’épargne à moyen terme et un PERECO, un épargne retraite collectif, afin d’offrir une solution d’épargne complète à ses salariés.

La mise en place d’un PEI est une décision stratégique qui nécessite une analyse précise de vos objectifs et de votre situation juridique. Pour sécuriser votre démarche, obtenir un conseil et choisir le dispositif de partage de la valeur le plus pertinent, contactez notre cabinet.

Sources

  • Code du travail : articles L. 3331-1 et suivants, R. 3332-1 et suivants
  • Code de commerce
  • Code monétaire et financier
  • Loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise
  • Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Loi Pacte)